Seule en sa demeure – Cécile Coulon

2021, Rentree Litteraire

« Forêts paisibles, // jamais un vain désir ne trouble ici nos cœurs. // S’ils sont sensibles, // Fortune, ce n’est pas au prix de tes faveurs. » d’après Jean-Philippe Rameau et Louis Fuzelier, Les Indes Galantes. La forêt comme cachette qui apaiserait les cœurs tourmentés, cachant en leur sein de noirs secrets. La forêt, comme refuge. Mais quand le refuge se mue en tombeau, quelles solutions s’offrent à nous pour survivre dans son hostile demeure ?

Seule en sa demeure, Cécile Coulon

Un domaine isolé, entouré de massifs verdoyants, perdu dans une tempête de feuilles et de branches, de racine et de chemins tortueux. C’est ce sur quoi j’adore tomber – aussi bien par mégarde que par dessein – lors des mes promenades en Finistère. Peut être parce que la végétation omniprésente et quelque peu étouffante dans sa magnificence me fait penser aux landes anglaises et écossaises, si bien décrite en littérature. Au sein desquelles j’ai été transportée et qui suscite en moi quelque émoi.

Un domaine isolé. Au lourd passé. Hanté de ses défunts qui par leur absence ont joué malgré eux un rôle dans la fortune des vivants. Le domaine devenant ainsi le théâtre d’un drame, ponctué de secrets, de non dits et d’interdits. Une ambiance moite et oppressante qui n’est pas sans rappeler Manderley, demeure de la Rebecca de Daphné de Maurier.

Un domaine isolé. Le lieu et également le personnage central – muet mais à la mémoire infinie – du dernier roman de Cécile Coulon, Seule en sa demeure. « Le domaine Marchère lui apparaîtrait comme un paysage après la brume. Jamais elle n’aurait vu un lieu pareil, jamais elle n’aurait pensé y vivre.  » C’est un mariage arrangé comme il en existait tant au XIXe siècle. À dix-huit ans, Aimée se plie au charme froid d’un riche propriétaire du Jura. Mais très vite, elle se heurte à ses silences et découvre avec effroi que sa première épouse est morte peu de temps après les noces. Tout devient menaçant, les murs hantés, les cris d’oiseaux la nuit, l’emprise d’Henria la servante. Jusqu’au jour où apparaît Émeline. Le domaine se transforme alors en un théâtre de non-dits, de désirs et de secrets enchâssés,  » car ici les âmes enterrent leurs fautes sous les feuilles et les branches, dans la terre et les ronces, et cela pour des siècles « .

Aimée. Un prénom qui prête à l’amour, à une histoire passionnelle et passionnée. En lieu de passion, un mariage arrangé. En lieu de vie romanesque, des déambulations au sein de sa demeure, en laquelle elle se sent étrangère. En mue entre l’enfance et l’âge adulte. En mutation entre ses devoirs de fille et son devoir d’en avoir une à son tour.

Marchère. Le nom d’un homme. Le nom d’un domaine. Le noms des épouses – vivante et défunte. Le nom d’une fatalité, dont le sceau l’a marqué depuis toujours. Le nom d’un devoir. De vertu, de descendance, de resilience.

J’ai eu un coup de cœur pour la plume de Cécile Coulon avec Une bête au Paradis. J’ai adoré la retrouver avec Seule en sa demeure, dans un genre différent, mais avec des thèmes forts, omniscients, qui me plaisent et m’hypnotisent, comme la place centrale d’un lieu dont on ne peut se défaire, dont on ne veut se défaire.

Bonne lecture à vous !

Seule en sa demeure de Cécile Coulon est disponibles aux éditions de l’Iconoclaste

2 réflexions sur “Seule en sa demeure – Cécile Coulon

  1. Étonnamment, quand j’ai commencé à voir ce roman un peu partout sur Instagram j’ai cru que c’était un roman policier puis j’ai lu le résumé et je me suis dit que non, en fait. 🙂 Le trame est historique et me tente du coup beaucoup plus…je ne sais pas pourquoi mais cela m’évoque un peu l’univers de George Sand ou celui de Rebecca de Daphné du Maurier. Je vais noter ce roman dans ma liste d’envies et voir si je l’en sors un de ces jours ou pas. 🙂

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