Bilan Janvier 2022

2022

La carte postale, d’Anne BerestEditions Grasset

Après, de Stephen King – Editions Albin Michel

L’aile des Vierges, de Laurence PeyrinEditions Pocket

L’ombre du Lac, de Laure RollierEditions Moissons Noires

J’ai des idées pour détruire ton ego, d’Albane Linÿer – Editions Folio

La femme périphérique, de Sophie Pointurier – Editions Harper Collins

La femme périphérique – Sophie Pointurier

2022, Feel Good, Rentree Litteraire

« Die wiedervereinigung » De mes dix années d’allemand, c’est l’un des rares mots dont je me souviens. Il signifie la réunification, suite à la chute du mur de Berlin. J’avais deux ans le 9 novembre 1989 et ne garde aucun souvenir de ce jour historique. Si ce n’est ce que j’en ai appris en cours d’Histoire.

La femme périphérique, Sophie Pointurier

Quoi de mieux que l’art – quel qu’il soit – pour représenter le mal être qui nous habite. L’écriture, pour coucher ses noires pensées. La musique, pour rendre mélodique un spleen envahissant et permanent. La peinture, pour jeter sur la toile sa colère et sa frustration, ses point de vues et ses interrogations. Certes, l’art est également lié au bonheur. Mais en ce qui me concerne, je préfère son versant obscure, plus profond, plus torturé.

Quoi de mieux que la subjectivité de l’art pour parler d’une ville morcelée, coupée arbitrairement, de la frugalité de la RDA contre l’aisance abondante de la RFA. La subjectivité justement, propre à son auteur. Que devient le message quand il est approprié par des tiers, qui ne savent rien de la genèse de l’œuvre ? Qui extrapolent sur des codes ou des savoirs généraux que eux seraient seuls à connaitre ?

C’est ainsi que Petra Wolf va faire l’objet de calomnies et d’une traque, basée sur des légendes et des égos, dans la Femme Périphérique de Sophie Pointurier : « Peter et Petra Wolf forment le couple le plus en vue de la scène artistique allemande depuis les années  1990. Il est l’artiste maudit de l’Est dont on a perdu la trace, elle est l’ancienne professeure d’arts plastiques venue de l’Ouest que le petit monde de l’art envisage comme la gardienne du génie de son homme. Une femme sans talent qui divise dans un pays coupé en deux.
Trente ans après la chute du Mur, alors qu’une biographie est en préparation au sujet du duo culte, un mystère plane sur les circonstances de la disparition de Peter. Et la perspective d’une actualité brûlante crée du remous dans le circuit des musées.
Qui a tué le peintre ? Usurpation d’identité, fraude, faux et usage de faux  : tout accuse Petra.
L’enquête, entre Paris, Berlin et New York, révélera ce que la légende, jusque-là, avait tu. »

Un duo d’artistes. Des œuvres à quatre mains, quottées de part le monde. Elle, porte parole, connue de tous, mais femme de l’ombre, malgré tout, femme périphérique. Lui, homme mystère, que certains se piquent de connaître, qui cristallisent les conversations, l’homme comme moteur du feu artistique, puisqu’homme. La réalité est toute autre, mais certains ne voient que les façades qu’ils ont choisi eux même de créer.

De Berlin-Est à Berlins Ouest, à New York puis à Berlin, un voyage autour d’un couple mythique, de la dissection des ses œuvres, de la vérité aux mensonges et aux non-dits, des histoires personnelles qui croisent l’Histoire, et s’entremêlent pour ne faire qu’un. En bref, une lecture plus que prenante que la Femme Périphérique, premier roman réussi de Sophie Pointurier.

Bonne lecture à vous !

La femme périphérique de Sophie Pointurier est disponible aux éditions Harper Collins

La Sourde Oreille – Anne de Kinkelin

Feel Good

« Le clou qui dépasse appelle le coup de marteau » Ce proverbe japonais, il m’aura fallu le temps d’une lecture pour le comprendre et me l’approprier, a l’instar de Joséphine Ikeda, héroïne atypique privée en partie de ce sens qu’est l’ouïe. Etre soi-même quand on ne rentre pas dans les cases pré dessinées n’est pas toujours chose aisée, mais le faire malgré tout est une preuve de force incontestée.

La sourde oreille, Anne de Kinkelin

La restauration a longtemps été une vocation pour moi. L’une des nombreuses qui ne s’est pas concrétisée, mais celle ci à malgré toute cette place particulière dans un petit coin de ma tête. Pas de firmament ni d’étoiles en vue, mais juste le plaisir d’une table simple, où se réuniraient ceux qui aiment les plaisirs de la chair. Mais également, ceux qui s’aiment tout simplement. A défaut, j’aime en être cliente – du bistrot du coin de la rue au établissement plus huppé à nappes blanches. Une autre fois peut-être je vous parlerais de mon amour des cloches en argent.

Après avoir été privée comme tout à chacun plusieurs mois des joies d’un repas au restaurant, je me suis rattrapée dans mes lectures. Qui ont ravies mes papilles. Mais qui ont également fait montre parfois d’une violence derrière le rideau dont j’étais loin de me douter.

C’est ainsi que j’ai rencontré Joséphine Ikeda, cheffe de partie poissons dans un étoilé parisien, celle qui est devenue La Sourde Oreille : « Joséphine Ikeda était prête à tout pour réaliser son rêve  : travailler soixante-dix heures par semaine, gagner un salaire de misère, encaisser le mépris, les brimades, les moqueries. Cette fille de restaurateurs japonais exilés en Bretagne a gagné ses galons en devenant cheffe de partie poisson dans un étoilé parisien. Une spécialité peu prisée de la gent féminine, dans un monde à majorité masculine. En cuisine, comme partout ailleurs, il y a des codes. Quand ces codes sont prétextes à la violence, il y a un adage  : «  C’est le métier qui rentre.  » À l’issue d’un dîner où son chef lui fera payer cher son talent, ordonnant son renvoi, la jeune prodige atteint ses limites physiques  : perte partielle de l’audition. Les hommes, Joséphine Ikeda ne les entend plus. Passé l’effroi et dans l’espoir d’une guérison, une option  : tout changer. Et ça commence par un aller simple pour la Bretagne. »

Paris comme un traumatisme. La Bretagne comme un exil. Un sens partiellement amputé, qui renforce les quatre autres, et qui permet de se recentrer sur l’essentiel, à savoir la personne que nous sommes. Qui est-elle réellement Joséphine Ikéda ? C’est cela au final dont il est question. De la quête de sens de son existence. Du pouvoir de ses racines, de ses origines. De la violence que certain homme témoigne envers les femmes, sous couvert qu’elles ne sont que femmes. De se retrouver pour mieux avancer, et faire entendre sa voix à défaut de trouver celles des autres.

J’ai aimé retrouver la plume douce et délicate d’Anne de Kinkelin, qui m’avait tant séduite il va y avoir deux ans, avec L‘année du flamant rose. J’ai aimé retrouver sous ses mots une héroïne qui ne se sait pas forte, mais qui apprend à le devenir, pour finir par se transcender. J’ai aimé que chaque chapitre porte le nom d’un poisson, couplé de sa caractéristique propre. J’ai aimé cette lecture pour les sentiments et les gouts suscitée en moi. La Sourde Oreille a été pour ma part une belle lecture. A emporter dans vos valises cet été.

Belle lecture à vous !

La sourde oreille d’Anne de Kinkelin est disponible aux éditions Harper Collins Traversée.