Le talentueux Monsieur Gilmour

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Invitation : (nom féminin) action de prier quelqu’un de venir, de se trouver à un endroit donné, à participer à quelque chose. On pense alors à un moment plaisant, de partage et d’émotions positive. En bref, une invitation est pour moi synonyme de convivialité et de bienveillance.

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Je vous rassure, il m’arrive de sortir du lit parfois (et même de le faire !)

L’été, j’affectionne particulièrement la presse féminine. Et quand Glamour me donne sur un plateau d’argent le top des romans de l’été 2018, je m’y intéresse un tant soit peu. Mon dévolu s’est immédiatement jeté sur L’Invitation d’Elizabeth Day.

Le premier de couverture d’abord, épuré mais qui est vecteur de messages cachés, que l’on retrouve plus clairement dans son pendant, le quatrième de couverture : « Ben Fitzmaurice est devenu le meilleur ami de Martin Gilmour le jour où, dans la cour de leur très chic école, Ben, héritier d’une prestigieuse dynastie, a pris la défense de Martin, petit boursier, fils unique d’une mère célibataire sans le sou. Depuis, Ben s’est fait un nom en politique, Martin est devenu critique d’art ; Ben a épousé la très parfaite Serena, Martin vit avec la très discrète Lucy. Et Ben est toujours le meilleur ami de Martin.Ce soir, Ben fête ses quarante ans. Tout le gratin est présent. Martin aussi. Naturellement…Le lendemain, Serena est dans le coma ; Lucy est internée. Ben est à l’hôpital ; Martin, lui, répond aux questions des policiers : que s’est-il passé durant cette soirée ? Pourquoi un tel déchaînement de violence ? Et si cette amitié en apparence parfaite cachait en réalité des sentiments bien plus troubles ? »

Je ne sais pas pourquoi mais le titre de ce roman me fait immanquablement penser à Benabar et son couplet « Je veux pas y aller à ce dîner – J’ai pas le moral, je suis fatigué – Ils nous en voudront pas – Allez, on n’y va pas ». Et aux regards de cette première lecture, on se dit qu’il aurait mieux fallu que les Gilmour n’y aille pas non plus.

Avec L’invitation, nous sommes dans un roman de mœurs, dépeintes avec tout le flegme et l’humour noir dont un britannique puissent faire preuve. La narration sur trois temporalités nous permet quant à elle d’esquisser les bribes d’un drame. Le tout savamment mélangé nous donne un réjouissant cocktail à lire.

Une intrigue en trois temps donc. Au poste de police après le drame, ce qu on pourrait qualifier de temps présent, où Martin se taille la part du lion en tant que narrateur principal. La première impression que l’on se fait des principaux protagonistes se cristallise donc autour de sont point de vue, subjectif. La veille du drame, ensuite, à la soirée d’anniversaire des Fitzmaurice dans un prieuré de la campagne anglaise huppée. Les points de vues se confondent entre Martin et sa femme Lucy. Et enfin, la genèse, la naissance de l’amitié de Martin et Ben, où le narrateur se fait omniscient.

Cette amitié justement est au centre du roman. La définition y est revisitée par le prisme des rangs sociaux. La haute bourgeoisie est passée au vitriol. Certes la reconnaisse dûe à votre rang peut vous être apportée, mais à quel prix ? L’argent peut il acheter l’intégrité ? C’est ce qui nous est suggéré. Elisabeth Day dépeint une amitié qui s’apparente plus à de la prostitution qu’à du sentimentalisme pur, au risque de se perdre soi même, de devenir l’ombre de l’autre.

Martin Gilmour me fait penser à un certain Thomas Ripley, que certains qualifieraient de talentueux. Toutefois nous ne sommes pas ici tant dans l’usurpation d’identité que dans un mimétisme exacerbé, lié à un amour homosexuel refoulé.

J’espère n’en avoir pas trop dit et vous avoir suscité l’envie de cette plaisante lecture.

Belle lecture à vous ! 🎈

L’Invitation d’Elisabeth Day est publié aux Editions Belfond.