Nous sommes tous hystériques

2019, Rentree Litteraire

Hystérie : (nom féminin) Névrose qui se caractérise par des réactions excessives, théâtrales et une hypersensibilité. C’est ainsi que la décrit la psychiatrie. La psychanalyse, quant à elle, attribue ses manifestations corporelles au refoulement.  La forme de cette maladie, telle que décrite par Charcot, a disparu à ce jour.

Le bal des folles, Victoria Mas

De la Salpêtrière je ne connaissais que les urgences, suite à une crise d’angoisse survenue il y a quelques années. Mais absolument rien en l’occurrence de l’histoire du lieu. A une autre époque,  aurais-je été qualifiée d’aliénée ? Je pense que oui. Heureusement pour moi, les mœurs ont tout de même changé.

De Charcot, je n’ai longtemps connu qu’un nom par la biais de blague potache collégienne. Le nom de l’établissement psychiatrique proche de notre habitat. Il y a quelques années, j’ai pu associé à ce nom une personne, un être un médecin par le biais du film Augustine. Je me rappelle avoir ressenti un mélange de fascination et de dégoût. Entre médecine avant-gardiste et point de vue réducteur de la femme, résumé à ses simples attributs reproducteurs.

En ce mois de Septembre, je recroise le chemin de Charcot et franchit à nouveau les portes de la Salpêtrière pour assister [au] bal des folles, de Victoria Mas. »Chaque année, à la mi-carême, se tient un très étrange Bal des Folles. Le temps d’une soirée, le Tout-Paris s’encanaille sur des airs de valse et de polka en compagnie de femmes déguisées en colombines, gitanes, zouaves et autres mousquetaires. Réparti sur deux salles – d’un côté les idiotes et les épileptiques ; de l’autre les hystériques, les folles et les maniaques – ce bal est en réalité l’une des dernières expérimentations de Charcot, désireux de faire des malades de la Salpêtrière des femmes comme les autres. »

Au bal, nous n’y assisterons que quelques minutes, assez pour comprendre la fascination malsaine que les aliénées pouvaient représenter pour le Paris mondain. Des bêtes de foire. Déshumanisées. L’animalerie du Jardin des Plantes, n’étant plus, il faut bien s’occuper. Tout bonnement abject, de la part des auto proclamés bien pensant.

Mais ce bal est prétexte à la rencontre avec quatre femmes, aux antipodes les unes des autres. Mais unie par un même lieu. Cette même prison physique et intellectuelle dont elles dépendent. Ce même statut de femme qui les empêche de trop être sans qu’on les vilipende ou les traite de folles. L’incompréhension mène souvent à la peur. Et il bien plus simple de cacher les causes, plutôt que des les affronter.

Ces aliénés sont des femmes comme les autres, au destin brisé. Volé par les aléas de la vie. Les mauvaises rencontres. Les traumatismes. Plutôt que de chercher à les comprendre, on les enferme. Les privant ainsi du seul luxe dont elle jouissait, leur liberté. Pis. Leur liberté de penser.

Le bal des folles de Victoria Mas a été pour moi un véritable coup de cœur. Il résonne tristement avec notre époque, où nous devons à nouveau nous battre pour nos droits, pour le simple prétexte d’être femme. La plume est belle, le verbe est haut. En bref, ne passez pas à côté de cette pépite de la rentrée littéraire 2019.

Belle lecture à vous !

Le bal des folles, de Victoria Mas est disponible auxéditions Albin Michel

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